lundi 3 octobre 2011

Quelque part en Apulie, vers 216 avant JC…

Deux armées s’avancent dans la plaine. A l’est s’élève une rude colline escarpée. Au centre nord, une colline sert déjà d’observatoire à l’une des forces. Enfin, à l’ouest s’étendent les ruines d’un ancien temple de Venus,  abandonné après sa destruction par un incendie lors de bacchanales.

La fraîcheur de la matinée est agréable alors que l’atmosphère est bercée par le chant entêtant des cigales. Les deux lignes se font maintenant face. Au sud, se rangent les troupes romaines sous le commandement de Lucius Aemilius Paullus, consul de Rome. Au nord, se tient sur la colline Magon à la tête d’une force punique composée essentiellement d’Ibères…




« Je suis Sextus Eonus Viridius. Je me tiens sur le flanc gauche de notre armée. Velites, nous formons un écran de combattants en tirailleur devant nos lignes. La sueur coule le long de mon cou, mais je sais que le casque de bronze que je porte pourra me sauver la vie. J’essaie de me détendre les épaules pour être prêt à lancer avec adresse mes hastae velitares (javelots). J’entends le cornu et j’ordonne aussitôt à mes camarades d’avancer et nous nous élançons en petites foulées.


J’aperçois soudain un groupe de frondeurs qui émergent des ruines du temple. Je lève mon bouclier pour me protéger des pierres mortelles. Fortuna est avec nous et peu d’entre mes camarades tombent. Je reconnais des gens des Baleares et mon oncle commerçant m’a appris quelques mots de leur idiome. Je leur hurle aussitôt quelques insultes bien senties où il est question de virilité, de leur mère et de leurs sœurs. La réaction ne se fait pas atteindre, ils sortent des ruines pour venir à notre rencontre sans manquer de lancer des pierres mais avec moins de précision tant leur agitation est grande et leur désir d’en découdre avec les mains ou le front est forte. Notre course s’accélère et nous lançons nos javelots comme un seul homme sur les tirailleurs adverses que je pense ligures. Il ne manque pas de répliquer et mon casque dévie un javelot et Mars en soit loué j’en sors indemne. Nous sommes maintenant en pleine course et nous obliquons légèrement pour percuter les frondeurs de plein fouet. Mes muscles me tirent mais la furor monte en moi. J’arme mon bras et j’envoie ma lance vers un homme à quelques pas de moi. Elle transperce sans pitié le cou du combattant.  Je n’ai pas le temps d’en voir plus que je dégaine mon gladius en détournant un méchant coup grâce à mon bouclier. Je relève celui-ci et frappe la cuisse de l’homme déchirant muscles et chairs. Il tombe, j’enfonce mon arme dans sa poitrine et le sang jaillit à profusion. Je relève la tête et regarde mes frères d’armes eux aussi victorieux. Peu d’entre eux gisent au sol alors que les lamentations adverses sont nombreuses. 


Les rares survivants fuient vers les ruines et nous nous élançons à leur poursuite. Je récupère au passage ma lance du cou du malheureux qui a été cloué au sol. Je sens ma tunique poisseuse de sang venir se coller contre mon ventre, alors que dans notre élan, nous tombons sur le monstre qui barrit et fait trembler le sol. Je pense, l’espace d’une seconde, qu’il vaut mieux que cela soit nous qu’une manipule d’hastati car nous nous sommes entraînés pour cela. Je me porte en avant pour montrer l’exemple à mes hommes car je suis leur Decanus. J’ajuste le mieux possible ma lance alors que je m’élance droit vers l’animal. Nous n’avons qu’une seule chance et nous devons la saisir ou nous rejoindrons tous le royaume de Pluton.


Je souffle profondément avant de bloquer ma respiration. Ma main calleuse libère l’arme qui file droit vers sa cible. Elle s’enfonce dans l’œil du pachyderme qui hurle et semble pris de panique. Lucius, mon frère d’arme qui lui aussi travaillait, il y a encore peu, sur les docks d’Ostia, arrive à abattre de sa lance l’un des numides qui se tenait sur l’animal.

Ce dernier tombe au sol, la poitrine transpercée, et rend son dernier râle lorsque l’éléphant pris d’une cavalcade incontrôlable le piétine. Le spectacle est particulièrement écœurant, mais mes nerfs tiennent bon. Il est maintenant temps de voir comment tourne le reste du combat dont on entend le vacarme et la clameur à notre droite… »


« Je suis Arnth Velimna Aules. Je suis étrusque et je combats en première ligne d’une manipule Hastati alliée de Rome. Nous sommes sur le flanc gauche de la ligne et nous faisons face à de nombreux adversaires que l’on devine sur le colline à travers les velites qui occupent le terrain devant nous. Je lance une prière à Laran, le dieu de la guerre et je vois du coin de l’œil que mes compagnons font de même. Nous sommes tous jeunes et sans beaucoup d’expérience de ce genre de bataille. Je sens l’odeur de la transpiration qui monte de sous nos armures de cuir et de lin. 


Je soupèse mon scutum et crispe les doigts sur mon pillum. « Ô Laran, permets moi de revoir ma douce Cisra et mes enfants ». Le cornu retentit et nous recevons l’ordre d’avancer. Nous levons nos boucliers et avançons. Les boucliers s’entrechoquent, le souffle devient rauque. Le soleil sur ma droite vient faire briller les casques emplumés de mes camarades.  Les troupes légères devant nous sont plus rapides et bientôt ils lancent leurs javelines sur les tirailleurs adverses avant de les percuter dans un combat sanglant mais inégal. L’ennemi décimé file se réfugier derrière la ligne de troupes formées adverses qui nous fait maintenant face. Elle s’élance. Le sol tremble. Les velites refusent le choc et reflux de chaque côté de notre manipule.


Plus personne n’est donc entre les féroces espagnols et nous. La peur se saisit de moi lorsque je réalise leur nombre. Il me semble que nous ne sommes qu’une poignée face à eux. Seule la présence de mes frères d’armes autour de moi m’empêche de prendre la fuite. Je fige mon bouclier dans le sol, le temps de lancer mon pillum sur les rangs ennemis. Je ne prends pas le temps de viser car je me dépêche de relever mon bouclier pour détourner les traits adverses et pour me défendre de l’assaut éminent. Plooom !


Une masse compacte se heurte à mon bouclier. Je me campe, la jambe arrière tendue. Derrière moi, des mains et des épaules viennent me soutenir. Il ne faut pas lâcher. Ne pas flancher. J’entends des cris, des hurlements. C’est le chaos mais nous tenons fermement la ligne. 


 Je frappe où je peux avec mon gladius. Je l’enfonce d’estoc entre les boucliers et je sens parfois qu’il s’enfonce dans des chairs. Un coup sur mon casque, je suis sonné mais vivant. Je repousse mon adversaire d’un puissant coup de bouclier et un de mes frères me tirent vers l’arrière pour prendre ma place. Je n’avais pas entendu l’ordre de permuter. Je recule entre nos rangs pour reprendre mon souffle.

L’ennemi est nombreux mais leurs pertes sont énormes si bien qu’une partie d’entre eux reculent. Nous nous reformons pour mieux combattre l’adversaire. Nous sommes néanmoins épuisés par ce choc et c’est avec soulagement que nous recevons l’ordre de laisser passer la manipule de principes qui s’élancent depuis nos arrières à l’assaut. Nous réorganisons notre front. Cela me laisse le temps de voir que l’ensemble de notre ligne à permuter et que ceux sont les principes qui tiennent maintenant la ligne. A notre droite, le tribun Gnaeus Servilius Geminus se bat avec ardeur et courage pour défaire la grande bannière adverse qui s’écroule bientôt, la poitrine béante. Il en a à peine terminé que Magon, le chef adverse fait pleuvoir sur lui une pluie de coups. Notre brave tribun résiste pourtant et blesse même son adversaire.


Je porte mon regard plus loin sur ma droite pour voir que tous les hastati ont résisté avec succès au choc initial et reprennent maintenant leur souffle. Les blessés graves sont évacués vers l’arrière sous le regard habitué des Triarii romains qui forment notre ultime réserve. Mais une clameur s’élève devant nous, tout le monde se ressaisit. J’essuie la sueur qui coule dans mes yeux. Ma main est rouge de sang, ce n’est pas que de la sueur. Les principes font fuir la troupe espagnole qui se retrouvent prise au piège. En effet, les velites, vainqueurs du combat contre l’éléphant, viennent prendre à revers les fuyards qui se font massacrer. L’autre troupe d’Ibères, qui avait reculé devant nous, se tourne juste à temps pour recevoir la charge des principes portés par leur premier succès.


Les valeureux velites chargent dans le même temps le flanc droit des espagnols, alors que nous avançons pour soutenir cette terrible poussée et renforcer le centre par une possible prise de flanc des africains… »

« Je suis Marcus Minucius Rufus, Magister Equitum. Je dirige la cavalerie romaine et j’ai en charge notre flanc droit. A mes côtés se tient la cavalerie de nos alliés venus de Tarentes. Elle contourne la colline pour venir harceler de leurs javelines la cavalerie numide adverse. 


Ces derniers nous choisissent dans un premier temps pour cible avant de s’apercevoir que nous sommes bien équipés pour résister à leurs traits. La cavalerie de Tarente débouche enfin de l’autre côté de la colline alors que nous arrivons à portée de charge des numides. Ils se dérobent néanmoins et engagent avec les tarentins un combat digne du « Soldat fanfaron » de notre bon Titus Maccius Plautus.


Un ballet équestre commence alors où chacun tourne et retourne en lançant leurs javelots sur l’adversaire. Les deux troupes se bloquent et s’annulent mutuellement. Notre heure arrive enfin car les cavaliers lourds ibériques apparaissent derrière les  rangs numides qui s’écartent pour les laisser passer. 


Toute la bataille sur le flanc va se jouer lors de notre confrontation. J’ordonne donc à mes troupes de reculer pour mieux pouvoir s’élancer et pour permettre aux fantassins à notre gauche de venir nous épauler en cas de besoin. Les Ibères continuent leur progression et je fais alors donner la charge.


Ma lance file dans les airs et nous engageons le combat. Nous remportons le premier assaut et le second avec le soutien de notre musicien. Je vérifie la situation sur notre gauche. La victoire est à portée de main si nous tenons encore un peu car les hastati viennent de s’élancer à nouveau dans une charge impétueuse.


Les Celtibères épuisés tournent le dos et prennent la fuite. Je dévies un coup d’épée de mon bouclier et assène un coup vicieux à mon adversaire. Mon gladius s’enfonce dans son aine et ressort de l’autre côté pour pénétrer jusque dans sa monture. Mon regard se tourne à nouveau vers le centre. Des velites viennent nous porter renfort alors que les hastati massacrent maintenant les celtibères fuyards. Prises dans une nasse qui se referme lentement, les troupes de Magon quittent alors dans le plus grand désordre le champ de bataille. La victoire est à nous. »

Il est maintenant midi et la bataille est terminée. Sur le champ de bataille gisent les cadavres de ceux qui sont tombés. Les troupes romaines sont victorieuses et profitent de l’ombre des oliviers pour se reposer et se nourrir. Les armures sont ouvertes, les casques posés au sol, et les boucliers servent de tables de fortune. On échange des plaisanteries, on rit, on est heureux d’être vivant, on pense aussi en secret aux camarades morts…


Résultat : 20- 0. Pas d’ABP perdu pour les romains et 10 pour le carthaginois de Jehan.

Ce fut une belle bataille. Deux armées historiques se sont rencontrées et celle de Jehan est très bien peinte, ce qui démultiplie le plaisir de l’affronter. Mon armée de Romains Républicains a fait une superbe première sortie qui tient beaucoup au fait que mon adversaire a fait preuve d’un courage sans doute mal placé et s’obstinant à faire des lancer de dés plus que médiocres. Encore merci à Jehan pour cette agréable soirée et à bientôt pour la revanche…


Points de règles :
- En cas d’égalité d’initiative, celui qui a le momentum frappe en premier.
- Ne pas oublier le 1 ABP quand la grande bannière meurt.
- Comment gérer un défi avec le système de manipule ?
- Règle d’engagement lors d’une charge de tirailleurs.
- Maximiser le front en cas de charge d’une unité formée.

Plans de la bataille :







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